Dans une famille bourgeoise, au début du XXème siècle, les mariages, les naissances et les décès se succèdent au fil des ans. Le destin des femmes, lui, semble immuable. Vouées à se marier sans qu’on leur demande forcément leur avis puis à enfanter, elles se transmettent de manière inconsciente le renoncement et la foi dans le recommencement éternel du cycle de la vie. Alice Ferney leur rend, à travers son roman, un bien bel hommage.
Il y a d’abord Valentine dont le ventre enfle à périodes régulières et qui met au monde de nombreux enfants. Le malheur ne l’épargne pas pour autant. Elle assiste impuissante à la mort des siens, se relevant chaque fois, parce que la vie est plus forte que tout. Au fond d’elle, elle porte pourtant le deuil et c’est avec plaisir qu’elle rejoint enfin Jules, son mari, le jour où elle ferme les yeux.
Il y a ensuite Mathilde, femme d’Henri et belle-fille de Valentine, et sa cousine Gabrielle. Elles aussi mettent au monde plusieurs enfants. Gabrielle moins que Mathilde puisque son mari décède sous ses yeux par une belle journée d’été. Encore une veuve. Mathilde enchaîne les grossesses alors que le médecin prévient son mari des risques toujours plus importants qu’elle encourt. Mais Henri est sourd et Mathilde prend beaucoup de plaisir à donner la vie. Le destin, pour elle comme pour toutes les femmes de la famille, finira par se révèler encore une fois tragique.
Après toutes ces femmes, il y en aura d’autres. Elles vont vivre dans une société différente mais porteront en elles les gènes de la famille. Car la vie ne s’arrête jamais. Quoi qu’il arrive.
Quel magnifique roman, porté par une voix admirable, celle de Dominique Reymond. Le ton est juste. Il accentue l’élégance du style d’Alice Ferney et rend l’histoire de Valentine, Mathilde, Gabrielle et les autres somptueuse. Les mots de l’auteure traduisent tout l’amour et toute la tendresse qu’éprouvent ces femmes, à la vie pourtant si tragique, vis à vis de leur famille. Elles sont belles par leur courage, par leur capacité à toujours se relever, par leur persévérance.
Ces femmes, ce sont nos mères, nos grand-mères, nos arrières grand-mères. Même si elles ne sont pas du même milieu bourgeois, même si elles n’ont pas vécu tout à fait à la même époque, même si elles n’ont pas eu autant d’enfants, même si leur histoire est différente. A la lecture de L’élégance des veuves, des discussions que j’ai eues avec ma grand-mère me sont revenues en mémoire. Je sais que tout ce qu’elle m’a raconté, je le porte en moi, comme les générations de femmes successives de ce roman.
Le livre est court (moins de 3h d’écoute) et on quitte à regret les personnages dont on ne voudrait pourtant pas partager la vie. Il a été adapté au cinéma sous le titre Éternité. Je pense que je le regarderai un jour mais pas tout de suite. Je risquerai d’être déçue tant j’ai aimé ce roman.
Une lecture commune que j’ai le plaisir de partager avec Enna.
FERNEY, Alice, REYMOND, Dominique, L’élégance des veuves, Audiolib, 2016.
Roman et film me tentent!
Le film me tente aussi mais il faut que le souvenir du livre s’estompe sinon je vais forcément être déçue.
J’aime beaucoup ce que tu dis sur le fait que ces femmes sont ailleules ! Une très belle lecture pour moi aussi!
C’est un roman qui m’a touchée de manière très intime. Je ne m’attendais pas à cela.
(Outch, la jaquette me fait fuir.)
En revanche, le titre est sublime et ton article est très beau. Mais je crois incontestablement que s’il arrive entre mes mains, je privilégierai la version papier. Je suis incapable d’écouter un livre.
Oui, quelle jaquette ! Je pense que c’est en rapport avec le film mais elle fait fuir, c’est certain.
ça me rassure de voir que nous sommes du même avis. ^^
Tu me donnes envie de découvrir le livre, j’avais lu un autre excellent roman d’Alice Ferney « cherchez la femme » je te recommande !! 😉
Je crois que je n’ai lu qu’un autre roman de l’auteur mais j’ai envie de la découvrir un peu plus. Merci pour le conseil.
Voilà qui me tente. J’ai eu ce genre de discussion avec ma grand-mère également….
Ce sont de bons souvenirs pour moi. Ils font partie de ceux que je garde précieusement.
J’adore la plume de Ferney … je crois que je le lirai (l’audio est-il en version intégrale ?) et verrai le film en DVD ! 🙂
Oui, oui, c’est une version intégrale. Et comme le texte d’origine est court, le temps d’écoute n’est pas trop long.
Un beau billet pour un livre qui ne m’attirait pas plus que ça au départ. On verra si je le trouve à la bibliothèque.
J’espère qu’il te plaira autant qu’à moi !
Je le retiens !
Tu peux le faire sans hésiter !